Déclaration suite au rapport des sénateurs sur les missions locales
« Il est plus qu’urgent de ne pas confondre cohérence de territoire et de projets et homogénéisation avec uniformisation »
Suite au rendu du rapport des sénateurs MM. François Patriat (Socialiste et républicain – Côte-d’Or) et Jean-Claude Requier (RDSE – Tarn), rapporteurs spéciaux des crédits de la mission « Travail et emploi », devant la commission des finances réunie le 7 juin dernier portant sur les missions locales, plusieurs remarques m’animent. S’il est vrai que la légitimité et l’utilité des missions locales, qui prennent leur existence avec le rapport « Schwartz » sur l’insertion professionnelle et sociale des jeunes de 1981 ; sont confortées. Il est utile de rappeler que seules les structures missions locales dans le paysage de l’insertion, sont en mesures d’apporter aux 16-25 ans un accompagnement global en traitant les problématiques : santé, logement, insertion sociale et professionnelle, formation. Il est aussi utile de rappeler que les missions locales comme celle de Saint-Denis/Pierrefitte, voient sans cesse leur public augmenter en matière d’accueil et de suivis, avec des problématiques sociales et économiques plus complexe et nécessitant un accompagnement plus long pour les conseillers-ères d’insertion.
Devant ces réalités sociales et économiques, l’association Objectif Emploi qui porte la mission locale se trouve à la croisée des chemins entre nécessité de sanctuarisé ses financements, renforcer les partenariats afin de permettre les débouchés vers l’emploi durable et garantir une gouvernance stable et sécure. Malgré ces difficultés en 2016 c’est environ un millier de jeunes de la mission locale sur les 4000 suivis qui ont obtenu un emploi et ou une formation.
Les rapporteurs spéciaux estiment que quatre axes d’amélioration devraient être poursuivis :
• sécuriser les financements en améliorant le dialogue entre financeurs au niveau local
• procéder à une nouvelle clarification de la répartition des compétences entre Pôle emploi et les missions locales ;
• renforcer le suivi de l’activité des missions locales et envisager la mise en place d’un véritable pilotage par la performance tout en prévoyant une simplification des démarches administratives liées à la mise en œuvre de la Garantie jeunes ;
• poursuivre la rationalisation du réseau en renforçant l’échelon régional et en envisageant des mutualisations.
Les grands principes fondés par ces axes d’améliorations proposées par les rapporteurs me semblent devoir être ajustés. En premier lieu s’agissant de la logique de gestion par la performance. L’affirmation selon laquelle il n’y aurait pas d’application des critères de la CPO est fausse. Elles le sont depuis plus de 10 ans. En revanche il est nécessaire d’ajuster de manière beaucoup plus rapidement les écarts de financements liés aux indicateurs. Ces retards ont des conséquences importantes sur la trésorerie des associations et donc sur l’accompagnement des publics. Je regret que derrière des logiques de gestion et de performance se cache en réalité une volonté de soustraire par l’austérité les structures de moyens financiers dont ils ont tant besoin pour développer les actions. Le pilotage par la performance, devient la part la plus importante de notre financement et est trop orienté sur les résultats (sorties en emploi et en formation).
Cette logique ne permet pas une meilleure répartition des subventions, mais inciterait le réseau à accompagner les jeunes les plus proches de l’emploi ou d’une sortie positive, laissant de côté ceux qui cumulent le plus de difficulté. Ce qui serait un drame social énorme. Aujourd’hui 13 rations permettent de mesurer la performance. Ces derniers peuvent être des points d’appui pour échanger avec les différents financeurs mais en aucun cas une base pertinente pour apprécier et ou calculer les financements de fonctionnement des missions locales. De même que les échanges entre les structures et les financeurs seraient améliorés si ces derniers exploitaient d’avantage les instances prévues à cet effet, comme les conseils d’administration où ils sont membres de droit. Aucune nécessité de prévoir un échelon supplémentaire.
Je partage l’idée d’un nécessaire rééquilibrage de l’intervention de l’État sur le fonctionnement des missions locale, notamment sur un territoire comme celui de Saint-Denis et Pierrefitte. A ce jour, le financement de l’État par jeune accompagné ou par jeune sur le territoire de la ML peut varier de plus du simple au double, ce qui crée des disparités dans l’accompagnement.
Enfin, il est plus qu’urgent de ne pas confondre cohérence de territoire et de projets et homogénéisation et uniformisation. Je ne suis pas convaincue par la rationalisation à travers la mutualisation des moyens notamment dans une approche de fusion. Cette logique peut être pertinente pour certaine structure et dans un certain contexte territorial mais aucunement pour le territoire de l’association Objectif Emploi.
L’exemple de Paris est criant en la matière. Ces derniers ont rencontré de nombreuses difficultés et les économies ont été invisibles, parfois des surcoûts dans le démarrage ! En revanche, je plaide pour une mutualisation en matière de projets et d’actions lorsqu’il y a une cohérence territoriale et un intérêt pour les publics, dans une relation intelligente entre les professionnels. A l’image de certains projets/dispositifs portés de manière partenariale qui ont une réelle pertinente : exemple via Convergence – ANI, IEJ, Réussite Apprentissage ou entre 2 Missions Locales tel que nous le faisons avec l’AISPJA pour les POP).
Bally BAGAYOKO
Président de l’Association Objectif Emploi
Mission Locale Intercommunale Saint-Denis/Pierrefitte
Maire Adjoint en charge de l’emploi, l’insertion et la formation